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2004 – Emancipation

Avec le recul, je réalise que c’est au beau milieu des épuisantes tribulations et angoissantes bousculades de ce printemps 2004 que je suis vraiment devenue adulte.

L’étape marquante s’est produite dans le courant du mois de mai, lors d’une visite de mes parents venus me dépanner une semaine pour garder les puces pendant que Super Nounou prenait des vacances bien méritées.

J’avais depuis près de six mois réservé une location sur une île de la côte atlantique qui m’attire depuis des années. Mais je n’en avais encore rien dit à mes parents – car cela signifiait que cette année nous passerions nos vacances à la mer loin d’eux, et je préférais en parler de vive voix.

Evidemment, quand l’occasion s’est présentée, cela n’a pas été facile. C’était un soir après ma journée de travail et le souper préparé par ma mère, les enfants au lit, les hommes occupés je ne sais où. Je me souviens juste des précieux rayons de soleil rasants des soirs de mai, qui passaient enfin, à l’approche du solstice, à travers les grands arbres de derrière, jusqu’à la fenêtre de ma cuisine où je finissais de ranger la vaisselle avec Maman.

Elle a mal réagi.

Mais, pour la première fois de ma vie peut-être, moi pas.

Je l’ai regardée, déchiffrant presque consciemment tout son langage non verbal, en même temps que j’écoutais tous les arguments fallacieux qu’elle improvisait soudain pour me convaincre que ce choix de vacances n’était pas une bonne idée.

Ainsi, je voyais clairement devant moi les émotions négatives qu’elle me renvoyait brutalement et que jusque-là, dans de telles occasions (heureusement rares!) j’avais toujours laissées s’amplifier en moi et déborder jusqu’à ma propre perte de contrôle (typiquement, les larmes et la fuite, car je ne suis pas d’une nature colérique). Car j’étais toujours enfermée dans mon rôle de petite fille auprès d’elle, malgré tous mes efforts pour m’en sortir depuis l’adolescence.

Je voyais donc ces émotions – mais pour une fois, c’était clairement SES émotions, pas les miennes. Et au-delà du stress et de la fatigue, ou peut-être justement parce que j’étais dans une période tellement surmenée car ce petit incident n’était même plus capable de m’effleurer émotionnellement, je suis restée très calme.

Chaque argument qu’elle m’exposait était parfaitement démontable, car j’avais passé des soirées entières à préparer ces vacances et je n’avais négligé aucun détail. Des moustiques au surpeuplement en passant par l’eau froide, elle ne m’épargnait rien de ce que son imagination lui proposait dans le mode panique généré par ses émotions. Mais j’avais réponse à tout. Il y a des gens que la logique laisse insensible, mais pas Maman: elle a un bac+4 en maths, et je tiens mon esprit rationnel et logique autant d’elle que de mon père… Donc, en restant factuelle, je l’ai très vite ramenée à une discussion plus sensée et moins biaisée par les émotions, du moins, dans le langage.

En particulier, cela l’a forcée à m’écouter enfin, d’abord avec sa raison, puis plus profondément; car je me suis vite jetée dans le créneau, improvisant à mon tour, pour lui dire ma déception de la voir me détruire ainsi mon rêve de vacances dépaysantes, dont j’avais tant besoin à ce moment. Et cela juste parce qu’elle était déçue, triste et angoissée que je la laisse tomber… Je lui ai formulé verbalement, calmement et clairement, ces émotions qui venaient de l’aveugler jusqu’à m’exposer des arguments qui ne tenaient pas la route, et ce que ses émotions m’imposaient à moi, alors que j’attendais d’elle un autre soutien, plus positif…

Pour la première fois de ma vie, je l’ai prise en défaut. Car c’était la première fois que je la voyais soudain plus faible que moi, et à ma grande surprise, je l’ai entrevue trembler, comme si à son tour, elle devait maitriser une montée de larmes, alors que moi je restais calme… Elle m’a encore juste demandé ce qui m’arrivait, pourquoi je réagissais si bizarrement, car visiblement, pour elle aussi, quelque-chose avait changé… je me souviens lui avoir expliqué en 2 ou 3 phrases que je n’avais fait qu’appliquer avec elle les stratégies relationnelles apprises et développées sur le tas au travail. S’accrocher aux faits, aux arguments, à la logique au-delà des émotions et des schémas-types trop souvent figés, une fois qu’on a appris à décoder ces derniers intuitivement…

Nous nous sommes séparées pour aller méditer, ou oublier, cet incident chacune de notre côté.

Sur le coup, j’étais contente de moi, de ma maîtrise, de mon progrès…

Aujourd’hui, avec le recul, je regarde cette étape-là comme essentielle, mais j’en conçois aussi une certaine tristesse. La semaine suivante, elle a accompagné Mamie vers une étape difficile, sa perte d’autonomie nécessitant une hospitalisation permanente. C’était planifié pour son retour de Suisse, elle le savait, elle s’y préparait donc aussi psychologiquement… Bêtement, je n’ai pas du tout relié ces faits à l’époque, mais maintenant que je reconstitue le puzzle sur mes papyrus, je m’interroge…

Un cran de plus dans l’engrenage de la vie.

Depuis ce jour en tout cas, il me semble que notre relation a changé. Je suis plus sereine, je la comprends mieux, elle m’écoute et me parle avec plus de respect… passer cette étape m’a permis aussi de me tourner vers d’autres horizons… mais il me reste bien d’autres étapes à franchir, et je dois encore tant apprendre d’elle!

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Educations – le message

Ces deux visages sont ceux de Tilly Smith, une écolière d’Angleterre, et d’une petite "gitane de la mer", de la minorité ethnique Moken de Ko Surin, en Thaïlande.

Toutes deux auraient pu faire partie des centaines de milliers de morts emportés par les vagues dévastatrices du 26 décembre 2004.

Moken_1Mais les Mokens ont vu la mer montrer des signes étranges ce matin-là: "Les anciens ont pensé au crabe gigantesque, responsable des marées". La petite fille, ses parents, ses cousins, ses amis, tous ont suivi le patriarche du village dans la montagne, à temps pour que quasiment toute la communauté soit sauvée (181 personnes, 1 disparu). Cette communauté ethnique étant sous le parrainage étroit de l’UNESCO, son histoire a rapidement été médiatisée et a fait le tour de monde avec emphase sur l’importance de préserver le savoir ancestral de ces communautés.

TillyPar ailleurs, d’un peu plus loin, à Phuket, l’histoire de Tilly a également fait le tour des télévisions et des journaux du monde entier. Cette petite fille-là a utilisé le savoir fraîchement transmis par son école pour alerter et sauver une centaine de personnes. En effet, à défaut de savoir ancestral applicable dans cet environnement étranger, elle venait d’étudier le phénomène du tsunami en cours de sciences et elle a su en reconnaître les signes, l’expliquer à son tour et donner l’alerte sur la plage de ses vacances, avec l’aide de ses parents.

Savoir ancestral, savoir des livres, savoir d’école… voilà pour moi le message universel bien réel derrière ces deux histoires qui ont certainement été plus ou moins déformées par la voracité médiatique post-tsunami: nous sommes des êtres vivants doués d’intelligence, de mémoire et de langage, sans griffes, sans poils, sans dents acérées, sans nageoires et sans ailes, et pourtant nous savons voler et nager et nous déplacer plus vite que le plus rapide des animaux…

Le savoir est notre plus grande force, et l’éducation est la plus efficace de nos défenses. La survie de notre espèce en dépend depuis toujours, et on n’a pas fini d’en avoir besoin…

En outre, qu’une petite fille de passage arrive à sauver une centaine d’inconnus, presque autant qu’un patriarche de village, réceptacle des savoirs ancestraux que malheureusement seuls les siens écoutaient encore, c’est quand même fort, et cela motive drôlement à envoyer toutes les petites filles du monde à l’école, non?

Unescodde Un message similaire a été formatté par l’UNESCO dans le programme décennal d’Education au Développement Durable: ici.

Il est urgent d’apprendre, pour nous, pour nos enfants, et pour les enfants qui les suivront.

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Educations

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2 visages de notre humanité en devenir – 2 visages parmi des milliards, mais je ne publie pas ceux-ci en particulier ici par hasard…

Car derrière ces 2 visages, il y 2 histoires qui se croisent – et nous sommes des milliards à avoir ce carrefour de cette improbable collision désormais gravé dans notre inconscient collectif…

Ainsi, derrière ces 2 histoires, pour moi, émerge 1 message universel – qui m’est venu comme une évidence avec l’inspiration de la prochaine note, et que j’ai eu le plaisir de découvrir documenté de la même façon par l’UNESCO dans ma recherche…

Quel message?

La réponse au prochain épisode!

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Chemin de vie

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"L’important, ce n’est pas l’enfance qu’on a eue, c’est ce qu’on en a fait."

(Inconnu – Cité par Rosette Poletti dans "Dialogue de vie – La force d’une conviction", ed. Jouvence.)

Quand je lis des mots magnifiques sur certaines de vos pages, comme si les brins de vos vies qu’ils ensoleillent pouvaient venir enfin effacer ces parts de vos enfances qui sont restées blessées au coeur de vos coeurs, moi, je me sens toute petite…

Continuez…

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De l’anis étoilé dans le Tamiflu? pas si simple!

BadianeAlors voilà comme promis, j’ai fait quelques recherches internautes pour mieux comprendre si le Tamiflu était effectivement simplement tiré de la badiane chinoise, i.e. anis étoilé, comme l’ont rapporté les médias, et surtout pour voir si le fameux brevet licencié par le laboratoire Gilead au groupe Roche était aussi simpliste que les brevets relatifs à l’utilisation de l’ibogaïne que j’ai dénichés l’autre soir.

Comme introduction, l’OMPI a publié il y a quelques mois une note disponible en français traitant différentes questions autour de ce brevet spécifiquement – le fait que Roche en ait une licence exclusive sans avoir nécessairement la capacité de production nécessaire à la fabrication massive de stocks en vue d’une pandémie à court terme a en effet entraîné beaucoup de débats sur la question…

Partant de la référence citée par l’OMPI, j’ai donc pu aller regarder de plus près ce fameux brevet. Et là, franchement: ouf! ce brevet là ressemble déjà plus à un bon vrai brevet, dans le sens où n’étant pas du domaine, je n’y comprends rien: il est plein de formules chimiques que je suis absolument incapable de décrypter, n’étant pas spécialiste de ce domaine et loin s’en faut… Tout ce que j’ai pu faire, c’est chercher les références à l’acide shikimique, le fameux composant tiré de l’anis étoilé chinois, dans le texte. D’après ce que j’ai pu comprendre, le brevet décrit en effet, entre autres, différents procédés de fabrication de composés pharmaceutiques inhibant la neuramidase (l’arme du virus Influenza) à partir de différents éléments, dont ce fameux acide. Mais le brevet décrit des Tamiflu méthodes utilisant aussi d’autres acides, et il ne mentionne pas l’anis étoilé.

Car il s’agit apparemment bien d’un brevet technologique, décrivant une vraie invention humaine pour résoudre un vrai problème d’une manière vraiment originale. Enfin, pour autant que je puisse en juger. A vrai-dire, ce brevet devait avoir une sacrée valeur pour que Roche négocie une licence exclusive dès son dépôt ou presque. J’ai malheureusement vu des brevets prendre de la valeur après que des armées de bons avocats grassement payés se soient battus avec succès au tribunal sur leurs revendications, mais quand le brevet a de la valeur AVANT que les avocats fassent monter la mayonnaise, c’est encore plus fort.

Alors, cette histoire d’anis étoilé chinois?

Eh bien, s’il était le composant anti-grippal naturel de base comme auraient adoré les médias (très à la mode de montrer que Mère Nature vaut mieux que les ingénieurs)… il suffirait de boire du pastis pour faire passer la grippe! Honnêtement, je ne connais personne qui fasse son grog avec du pastis, mais bon, je ne suis pas de Marseille: chez moi, on utilisait du lambig.

En fouillant à peine plus loin, on trouve même une liste de préparations contenant cette plante (disponibles en pharmacies en France), dont la fameuse tisane Boldo qui conclut systématiquement les méga-bouffes chez ma belle-famille alsacienne… et que personne n’aurait idée d’utiliser pour la grippe!

N’empêche, toute cette histoire d’anis étoilé, effectivement largement utilisé par Roche pour obtenir facilement et à bas prix l’acide shikimique, a fini par entraîner une pénurie et une flambée du prix de ce composant pour la plus grande joie des chinois (ne pas oublier qu’ils sont bons en affaires ces gens-là!). Mais là encore, rien de nouveau: ainsi, bien avant la hantise du SARS et du H5N1, cette note du gouvernement français mentionnait le risque de contamination par de l’anis étoilé japonais (toxique) suite à la pénurie de son cousin chinois… avant 2001! apparemment, il y avait même déjà eu pénurie dans les années 70…

Et surtout, il ne faut pas négliger la créativité humaine pour contourner ce problème d’exclusivité. En voici 3 exemples:

synthèse de l’acide shikimique par biofermentation au moyen des bactéries E.Coli, maintenant utilisée pour une partie de la production du Tamiflu (personne n’a l’exclusivité de ces bactéries: on en a plein les tripes!)

synthèse de l’acide shikimique à partir de la pétrochimie (bof, je préfère garder le pétrole pour me chauffer?)

– et le gagnant est (avec un joli coup médiatique, au passage: bravo le marketing) extraction de l’acide shikimique des… aiguilles de sapins de Noël recyclés par Biolyse Pharma, un labo pharmaceutique canadien, avec la bénédiction du gouvernement canadien, ceci afin d’assurer la fabrication à prix minime et l’export à prix réduit d’un générique du Tamiflu à destination de pays non couverts par le brevet!

En conclusion, tout cela ne me dit pas comment trouver dans la pharmacopée naturelle de quoi échapper à ces vilains virus, mais au moins, je ressors rassénérée quant à la créativité des homo sapiens: après tout, si Mère Nature nous a donné un bon gros cerveau efficace, c’est pour qu’on s’en serve… donc, vive l’intelligence, et vive l’éducation…

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Ces plantes que l’on brevète

En relisant une vieille note de Manue parlant de l’Iboga, une plante africaine qui avait sevré un de ses potes junkie, j’ai été intriguée par la mention qu’elle faisait du brevet sur cette plante. Suite à ma recherche sur l’OGM Monsanto, je m’étais justement dit qu’il fallait que je regarde de plus près ces histoires de brevets sur le vivant. Voilà un bon cas d’école!Iboga_1

Un autre cas d’école est celui du Tamiflu, le fameux anti-grippe-aviaire sous licence de Roche, tiré lui aussi d’une plante chinoise: l’anis étoilé ou badiane chinoise, que vous avez peut-être déjà ingurgité dans une boisson à l’anis (pas moi, je n’aime pas l’anis!) ou tout simplement dans un curry un peu sophistiqué.

En effet, je trouve curieux que l’on puisse breveter l’effet actif d’une plante. A la rigueur le procédé permettant de l’extraire, ou de fabriquer un médicament en combinant l’extrait actif avec d’autres substances. Mais pas la molécule de base: je ne vois pas ce qui est inventif dans sa formulation!

J’ai donc regardé de plus près, tout d’abord, le cas de l’Iboga, ou plutôt de sa substance active l’ibogaïne, dans la base de données brevets US. En fait, c’est assez édifiant. Ce n’est pas le principe actif de la plante lui-même qui a été breveté, mais son utilisation thérapeutique, pas besoin de traduire je crois:

Howard S. Lotsof: U.S. Pat. No. 4,499,096 (issued in 1985, concerning heroin addiction), U.S. Pat. No. 4,587,243 (issued in 1986, concerning cocaine and amphetamine abuse), U.S. Pat. No. 4,857,523 (issued in 1989, concerning alcohol abuse), U.S. Pat. No. 5,026,697 (issued in 1991, concerning tobacco and nicotine), and U.S. Pat. No. 5,152,994 (issued in 1992, concerning people suffering from multiple drug dependencies).

La première revendication du premier brevet est toute simple: elle concerne le traitement d’un héroïnomane par un dosage compris entre 6 mg et 19 mg par kg de poids corporel d’ibogaine or d’un de ses composants actifs ou d’un mélange associé.  Autrement dit: quiconque applique ce traitement est sujet à poursuite légale pour violation de propriété intellectuelle, à moins d’avoir pris une licence auprès du détenteur du brevet. Reste au pauvre toxico-dépendant à trouver le moyen de filer au Gabon se faire initier au Wbiti par un gourou local pratiquant le chamanisme ancestral – en général, les brevets ne sont pas déposés dans ces pays sans potentiel commercial, et de toute façon, le dosage y est sûrement plus empirique…

Surprenant aussi, le brevet sur le traitement de la dépendance à la nicotine, bien que du même auteur quelques années plus tard, ne mentionne pas les applications précédemment brevetées. Pour ma part, si j’essayais de breveter une application similaire à un brevet précédemment déposé (même technologie appliquée à un problème similaire), je me ferais renvoyer par le cabinet de brevets qui dépose mes idées habituellement! (si si c’est du vécu) Le bureau des brevets n’aurait pas dû laisser passer cela (mais peut-être suis-je trop habituée aux pratiques européennes plus sévères).

Maintenant, la bonne nouvelle c’est que les deux premiers brevets doivent à présent être tombés dans le domaine public. Finies les cliniques sous license pour riches toxicos exclusivement (cf note de Manue), en tout cas pour héroïne et cocaïne. Sauf que… plusieurs pays, dont la Suisse, ont tout bonnement interdit cette plante trop hallucinogène pour être honnête, et qui n’a pas tardé à être récupérée par des apprentis-gourous maladroits, des maffieux malintentionnés et/ou des mouvances sectaires (à vrai-dire, son absorption n’a visiblement rien d’une partie de plaisir, et on peut en mourir); la France va probablement l’interdire à son tour.

Voilà l’intéressante histoire de l’Iboga! Maintenant, je continue mes recherches sur l’anis étoilé du Tamiflu, qui m’intéresse encore plus. En effet, je peux certainement vivre encore longtemps sans souci avec ma légère dépendance au chocolat et je n’ai aucune envie d’absorber quoi que ce soit d’hallucinogène, j’aurais trop peur d’y vivre un cauchemar, donc l’iboga très peu pour moi… Par contre, étant responsable de la santé de ma petite famille et assez fréquemment dans les aéroports pour lui ramener une cochonnerie virale, je dois avouer que la pandémie tant promise me terrorise! à suivre… 

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Petit progrès, grande joie

Je viens de faire un petit progrès, une vraie petite victoire sur moi-même, qui m’a donné beaucoup de joie et de confiance, alors je viens en partager un peu ici!

Pour Carnaval, je fais depuis 3 ans l’effort de déguiser mes puces en bricolant avec de vieux vêtements tant bien que mal, en comptant seulement sur mon imagination, car le travail manuel et artistique fait partie, avec le sport, de mes points faibles, depuis l’enfance où ces matières étaient toujours celles à problèmes dans mes carnets de note.

Mais cette année, mon inspiration, c’était les fleurs. Du coup, j’avais une très vague idée du costume et du masque à réaliser jusqu’à 2 semaines avant l’échéance, date à laquelle j’ai commencé à paniquer – comment donc arriver à mes fins dans les temps?

J’avais bien réalisé facilement 2 grandes corolles représentant les pétales avec une base en carton et du cordon élastique pour la fixation. Mais le dessin qui me venait intuitivement sur la feuille de mon "patron" impliquait clairement la réalisation d’une robe verte pour chaque petite. Or je n’avais absolument rien de ce style dans mes fringues de récup et surtout rien d’homogène.

Or, pour Noël, Mari Charmant avait ramené une machine à coudre à la maison: lui avait le vague espoir qu’une main habile de passage nous aiderait à recoudre la moitié des rideaux qui pendouille, et moi j’avais encouragé l’achat avec la conviction que ce serait lui qui s’y collerait… En effet, je suis complètement allergique à toute activité sérieuse de couture, ou pire, de tricot, depuis les décevantes tentatives de m’y initier par ma mère pendant mon enfance. Pas mon truc, je suis une intello moi! En outre, je suis toujours apeurée devant toute machine susceptible de transformer mon inévitable maladresse en carnage (j’ai déjà passé par la clinique de la main à cause d’un simple couteau de cuisine!).

Résultat: la machine était toujours dans son emballage, au grenier, dans l’attente d’une prochaine visite de Sainte-Maman-La-Super-Couturière.

Alors soudain m’est venu l’illumination. Avec cette machine, coudre 2 robes vertes pour mes petites fleurs ne devrait pas être une grande affaire pour Mari Charmant, si je lui préparais le tissu moi-même avec les instructions.

Je suis donc allée acheter le tissu en profitant de mon jour de congé, et le week-end venu, j’ai tracé le patron que j’avais imaginé à la craie, découpé les morceaux à assembler, et descendu la machine dans son emballage pas déballé.

Curieusement, juste à ce moment-là, Mari Charmant s’est trouvé fort occupé à réaliser des roses des sables corn-flakes-chocolat avec les filles, d’après une recette dénichée par Lili (fortuitement?). Pressée par le temps, J-6 dans le calendrier donc J-2 dans mon agenda de maman à double vie travail-maison, je me donc suis vue forcée de déballer la machine moi-même.

Diantre! c’est bigrement compliqué une machine à coudre. Impossible, en regardant la chose à vide, de comprendre par où va passer le fil. Normal: il y a DEUX fils, mais cela, je ne le sais pas encore. Je presse de questions Mari Charmant: c’est une machine, c’est son rayon, il sait tout cela naturellement. Hummmm. Il est vraiment TRES occupé avec les roses des sables. Et il commence à émettre des messages bizarres – "tu fais attention, tu ne vas pas te traverser un doigt avec l’aiguille, n’est-ce pas?". J’ai sorti le mode d’emploi pour comprendre moi-même au moins le vocabulaire (c’est quoi une canette?) en attendant qu’il mette enfin la machine en ordre de marche par lui-même, et voilà que… je le vois mal à l’aise.

Mes petites antennes kerleanesques commencent à m’alarmer: homme-pas-à-l’aise! homme-pas-à-l’aise!

Explication: j’ai étudié et travaillé avec des hommes depuis plus de 15 ans, plus longtemps encore que mon compagnonnage avec Mari Charmant, et à force, j’ai développé ces petites antennes qui me disent quand l’homme sait… ou pas. Parce que visiblement, il n’y a rien de pire pour la vaste majorité des gars que j’ai côtoyés que d’avouer: "je ne sais pas", en tout cas dès qu’il s’agit d’un domaine technique genre la voiture ou le lave-vaisselle en panne, sans parler des projets complexes dans lesquels je rame avec eux au boulot (et quand ce genre d’attitude conduit à découvrir à la dernière minute un problème qui donne un an de retard au projet global parce que pas un gars n’a osé communiquer ses doutes, cela me désespère, mais c’est une autre histoire).Machineacoudre

Et là petite antenne a dit: Mari Charmant n’a pas plus que toi idée de ce qu’est une canette, et en outre, lire le mode d’emploi est un acte tellement humiliant pour lui qu’il est inimaginable de lui imposer cet affront à son sacro-saint honneur masculin en ce chouette dimanche après-midi passé dans la bonne humeur autour des enfants, entre le projet gourmand des roses des sables et la fièvre des préparatifs carnavalesques…

Alors voilà comment, probablement en sauvant l’honneur de Mari Charmant, j’ai appris MOI-MEME ce qu’est une canette – il suffisait de savoir lire et suivre les instructions – et cousu MOI-MEME les deux robes. Y compris les ourlets des manches, car la machine dispose d’un bras libre. Y compris même un patch circulaire au col de la robe d’Ondine, que dans mon ignorance totale des pratiques de base de la couture j’avais découpé beaucoup trop large initialement.

Le résultat restait certes très amateur à regarder de près, mais a valu aux filles un joli succès d’estime au concours de masques (17èmes) et même une photo dans l’édition spéciale d’un journal local, ce qui les a beaucoup impressionnées. J’ai d’ailleurs eu le droit aux chaleureux remerciements de Lili – "tu sais, il n’y a pas beaucoup de mamans de mes copines qui font quelque-chose pour le carnaval". Yeeepppeee.

Carnaval2 Je ne suis pas toujours très disponible pour jouer avec mes puces, mais elles savent qu’elles peuvent compter sur un gros investissement de mon temps si précieux pour les grandes occasions qui ponctuent les années enfantines – anniversaires, fêtes d’école, etc. D’après ce que je me souviens de ma propre enfance, c’est essentiel.

Mais ce-faisant, j’ai aussi impressionné mes deux gourous de référence, Mari Charmant qui connaît assez ma hantise des travaux manuels et des machines pour savoir l’effort psychologique que j’y ai mis, et Super-Maman, qui mise au courant par le "téléphone arabe" version bretonne (via ma soeur), s’est soudain retrouvée ravie de voir enfin atteint le résultat attendu (patiemment) depuis 30 ans: eh oui, Kerleane se met à la couture! tout arrive!

N’exagérons rien: la machine est repartie au grenier et les rideaux pendouillent encore jusqu’à nouvel ordre (voire calendes grecques).

Mais cela faisait longtemps que je n’avais pas réalisé un tel petit progrès personnel, et cela m’a causé une grande joie, au point même que je suis plus en confiance depuis quelques jours sur différents projets professionnels…

En effet, à l’idée de tout ce que je peux encore apprendre avec un peu d’effort, la vie devant moi me paraît pleine de promesses de petites et grandes joies!

Je vous en souhaite autant: je suis sûre que la vie de chacun est pleine de ces petits pas en avant, mais trop souvent, on ne voit que les obstacles, et pas les avancées…

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Trop lent, trop vite, trop trop trop…

Visiblement les blogs souffrent de problèmes techniques majeurs ces jours: pour ma part je les vois tous ce soir, mais c’est LENT, terriblement lent. J’ai réussi à poster quelques commentaires (avec un record de 3 passages de code robot successifs chez Cica) malgré tout…

De toute façon je me vois forcée de passer trop VITE tous ces jours, car je me suis retrouvée complètement suragitée entre le Carnaval, le débarquement successif de mes frère, soeur et beaux-frères pour les vacances de février (sans neige hélas) en plein milieu d’un débordement d’activité professionnelle sans précédent (réunionnite/conférencite/téléphonite/voyagite combinées et par-dessus tout le pronostic inquiet d’une réorg sous un délai de 3 semaines top chrono selon rumeur qui s’amplifie, cela tombe à pic pour moi qui méditais justement les leçons de celle de 2004…). Plus l’organisation des vacances de Pâques, juin et août, et la garde de mes filles toujours "à vue" en attendant que Super Nounou reprenne du service (Dieu merci elle va enfin mieux).

En faisant le bilan je me suis démandé si je risquais le burn-out, mais j’ai trouvé depuis l’été passé tellement d’énergie que je ne me sens, curieusement, pas trop fatiguée malgré entre autres les soirées prolongées sur ces blogs. En fait je crois que cela me fait du bien, cela me change les idées après mes longues journées! D’ailleurs c’est le premier hiver depuis la naissance de ma fille aînée que je passe sans un seul rhume ni gastro sérieux (juste un mal de gorge traînant en janvier, et quelques maux de ventre) malgré la succession de virus dans ma petite famille.

M’enfin quand même cela en fait TROP ces jours et je compte les semaines me séparant des vacances de Pâques. Prévu une mini-mini cure balnéo pour me requinquer pendant que les puces feront du poney et Mari Charmant bouquinera tranquillement – je me réjouis d’avance!

En attendant ce lointain projet, j’espère revenir pleine d’inspiration pour notes et comm et mails – mais plus avant la semaine prochaine…

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2004 – Bousculade

C’est donc franchement épuisée que j’ai fini le printemps 2004.

Au mois d’avril, le plus gros et le plus vieux de mes projets a implosé, suite à une alliance industrielle contraire à nos intérêts au sein du consortium. Bien sûr les ruptures ne sont jamais aussi franches dans la réalité: on m’a donc demandé une étude complémentaire pour clarifier l’impact sur notre stratégie.

Au mois de mai, c’est à peine si j’ai réussi à croiser mon chef pour lui présenter les conclusions de l’étude. Visiblement, il s’affairait à des manoeuvres en haut lieu, repérables à une frénésie de réunionnite aigüe. J’étais à l’écart de l’agitation et ne m’en souciais guère: depuis 5 ans que je bossais avec lui, je savais qu’il écrantait toutes ces histoires politiques pour laisser bosser les gens tranquilles, et qu’il ferait appel à moi seulement quand il le jugerait utile.

Naïve, Kerleane, naïve! si j’avais écoutée mes petites antennes, j’aurais mieux anticipé ce qui se tramait.

Mi-juin, une dizaine de jours avant mon départ en vacances, chef convoque ses troupes, les 6 ou 7 personnes sous sa supervision directe. Et commence une présentation Powerpoint: Nouvelle Organisation. Tout le R&D est chamboulé: unités d’affaires désintégrées, fusion de départements, regroupement d’activités, lancement d’un département dédié expertise principale, on n’y retrouve plus ses petits, ni ses chefs, en tout cas moi: ancien chef a disparu dans l’organigramme (pudiquement, on appelle cela une mise au placard) et mon équipe qui fait partie de ses meubles sans doute plus décoratifs que fonctionnels, puisque je m’occupe de tous les projets exotiques, avant-garde et tordus qui traînent depuis 3-4 ans, donc, visiblement, personne ne se soucie de notre activité. Moi non plus, je ne suis dans aucun organigramme!

L’angoisse! heureusement qu’on ne supprime pas d’emplois. Commence donc alors l’humiliante tournée des chefs…

Chef remplaçant de chef précédent. Très gentil pendant l’entretien, mais visiblement peu inspiré de conserver cette activité atypique vu ses objectifs opérationnels ultra-prioritaires.

Super chef nouveau. Débarqué quelques semaines auparavant, ne connaît encore pas grand-monde, a visiblement placardé chef précédent, et nous accorde un long entretien à moi et mon premier lieutenant que j’ai appelé en renfort, pour nous expliquer sa vision révolutionnaire sur le fond comme sur la forme, tout en nous proposant des postes complètement différents dans une structure peu attractive. Nous sortons épouvantés par l’ampleur de la révolution et l’incompréhension fondamentale de nos assets technologiques que super chef nouveau vient de nous exposer avec une assurance telle qu’elle paraît inébranlable: la panique! je n’ai plus qu’une idée, trouver absolument une alternative pour ne PAS dépendre de lui. (En pratique il changera du tout au tout dans les mois qui suivront, et s’avèrera l’une des personnes les plus intelligentes croisées sur mon parcours professionnel par sa capacité d’adaptation. Mais c’est une autre histoire.)

Tout cela me laisse fort peu de possibilités.

En regardant les missions des nouveaux départements, il me paraît évident que mes activités doivent naturellement passer au département d’expertise principale qui échappe justement à super chef nouveau. J’arrive à négocier un créneau de 10mn téléphoniques dans l’agenda débordant du chef expertise principale fraîchement promu pour vendre mon équipe et mes projets. Hélas, refus poli mais ferme: "tu comprends Kerleane, j’ai déjà beaucoup de monde dans la barque, je ne peux pas prendre tes activités en plus". En pratique, dans les semaines et mois qui suivront, il ouvrira une dizaine de postes, et ne reviendra jamais vers nous… grrr.

La dernière possibilité est très embarrassante. A la restructuration précédente, j’avais hésité entre transférer mon activité dans une unité d’experts ou prendre la responsabilité d’une petite équipe en suivant mon ancien chef. Ma fidélité à ce dernier avait fait pencher la balance, et chef des experts m’en voulait peut-être encore un peu, car il avait besoin de peupler son équipe pour la rendre crédible et ma défection n’avait pas dû lui faciliter les choses. Je laisse donc trainer cette dernière option…

C’est la veille de mes vacances… je n’ai quasi pas dormi depuis une semaine, comme si tout mon décalage horaire pas digéré depuis la grippe de janvier se transformait en insomnie géante. J’ai réussi à organiser la réunion de la dernière chance, avec ancien chef et tous les grands chefs influents, sauf super chef nouveau grâce à une astuce d’agenda de connivence avec les assistantes, pour présenter mes activités et démontrer en une heure top chrono en quoi elles sont essentielles pour l’entreprise.

Le message est envoyé. Mais je pars en vacances ce soir-là sans savoir quel chef, quelle mission je trouverai au retour, ni si j’aurai encore mon équipe et mes projets.

Heureusement, j’avais cette annèe-là réservé une location tranquille et bien située sur l’Atlantique, et malgré l’affreuse météo de ce début juillet 2004, ces vacances furent les plus reposantes depuis des années.

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Mon esprit se vide – le soir, je vais longuement marcher sur la plage dans le fort vent d’ouest, une fois les enfants couchés, et toutes mes pensées parasites s’envolent ainsi, jour après jour. Un soir, il me revient à l’esprit le terrible cauchemar fait pendant la forte fièvre de janvier. J’y suivais ancien chef dans les bas-fonds de Los Angeles, une vraie cour de miracles dont je ne sortirai pas indemne, tandis que chef fraîchement promu à l’expertise principale (qui en janvier, était au même niveau hiérarchique) suivait un trottoir plus sûr jusque dans les beaux quartiers… sans nous!

Véridique! de quels éléments inconscients (mes petites antennes!) pouvais-je donc disposer en janvier pour prévoir aussi clairement cette situation? mon cerveau à 40.2°C avait-il soudain développé une perspicacité inhabituelle? je ne sais pas. Et le rêve s’arrêtait là me laissant dans l’expectative!

Finalement, je suis rentrée par le train de nuit un lundi matin, arrivée au bureau pas trop fraîche en milieu de matinée et m’attendant au pire, mais non, grand sourire de mes collaborateurs: l’équipe est transférée, telle quelle, au département des experts. La réalité est que ce chef là est le seul à ne pas avoir dit non au transfert (il dit rarement non). Premier lieutenant est dépité par son manque d’enthousiasme, et cherche à se recaser dans le département de l’expertise principale, mais n’y trouve pas son bonheur. Pour ma part j’en fais mon affaire. Il me faudra environ 3 mois pour gagner l’estime de ce nouveau chef, qui m’avouera à l’entretien de fin d’année qu’il avait sous-estimé la valeur de notre travail car il était toujours resté caché dans les cartons d’ancien chef…

Grande et dure leçon pour Kerleane donc: ne pas compter aveuglément sur son chef pour défendre son bifteck. J’ai vraiment passé par de grands doutes sur ma valeur dans toute cette période: puisque personne ne voulait de moi, c’est donc que je ne valais rien? Ce qui m’avait sauvée et permis de partir en vacances l’esprit serein, c’était l’assemblage de ma présentation aux grands chefs – des faits, des chiffres, des objectifs, du concret pour me convaincre moi-même et donc les autres de la valeur de ces activités.

Et j’ai aussi appris à déployer mes antennes et me rendre plus visible. Mieux connectée, mieux informée. Toutes ces grandes manoeuvres sont en train de recommencer apparemment… cela promet pour les prochaines semaines… et c’est le bon moment de tirer des leçons du passé.

A méditer!

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Une autre source d’obésité?

… pour rats, mais tellement meilleurs que les OGM: des livres, des livres, des livres!

BibliothequeEt puisque je veux ce soir partager une note positive avec tous les rats de bibliothèque de mon genre, tant de fois frustrés de ne pas trouver l’ouvrage de leurs rêves au fond des étagères qu’ils connaissaient par coeur à force de les avoir parcourues, voilà ce qui me réjouit aujourd’hui: miracle technologique à la racine d’un nouveau monde virtuel, balbutiant au début de notre 3ème millénaire, le web, qui met à la portée de qui sait bien les chercher plus d’informations qu’une seule bibliothèque n’en contiendra jamais sous forme papier (ce dont, accessoirement, les arbres nous sauront probablement gré).

Rien à faire de Monsanto, le vrai pouvoir, aujourd’hui pour demain, ne serait-il pas dans les mains de… Google?

Depuis toute petite, j’adore les livres, les librairies, les bibliothèques… tout ce qui représente le Savoir, tout ce que le cerveau humain a créé, toute cette information, cette érudition, ces histoires, ces réflexions… je ne suis au fond peut-être qu’un rat, un rat de bibliothèque…

Je mange les mots des autres, j’en suis même sans doute boulimique… et d’une gourmandise obsessionnelle, impossible à satisfaire: trop d’encyclopédies universelles ou spécifiques, trop de langues que je ne connais pas, qui ne me seront jamais accessibles! les yeux, les oreilles plus grands que le cerveau!

Mais au fait… que deviennent donc tous ces mots que je mange? suis-je devenue obèse de tout ce que j’ai lu?

Et vous, souffrez-vous des mêmes symptômes – boulimie livresque, boulimie d’infos? Janssens_jl_ratdebiblio